Chroniques de l'hypermonde.

n° 18. Janvier-février 1995

SUR NOTRE AGENDA

Quelques unes des séances, programmées sur les prochains mois.

14 février : DOMINIQUE CHRISTIAN,

présentera son dernier ouvrage : Philosophie et Management. L'auteur, philosophe et thérapeute, est un familier du Club. Spécialiste du Groupware, il montrera pourquoi l'entreprise fait de plus en plus appel aux sciences humaines pour accompagner le mise en œuvre des technologies de l'information.

14 mars : DR CHRISTOPHE DUVAUX,

directeur de l'Unité Loginat de Lille, spécialiste de télémédecine, nous fera part de son expérience dans le domaine du télé-diagnostic néo-natal par visio-communication et des avancées attendues dans le domaine.

4 avril : EVELYNE SKOROCHOD,

Consultante chez Arthur Andersen, nous fera part des initiatives prises par un grand cabinet de conseil dans la prospective des TICs.

Pour être tenu au courant sans délai, utilisez le service FAX. (Voir les conditions dans le bulletin d'inscription).

NOTORI&EACUTET&EACUTE

Pour la première fois depuis sa création, le Club de l'Hypermonde a été associé à la réponse à un appel d'offres public.

Le Ministère de la Culture a lancé fin 1994 une consultation pour animer l'espace socioculturel créé autour du Métafort d'Aubervilliers.

Installé dans un ancien fort, cette structure accueille les créateurs d'œuvres multimédia.

Le Club a répondu à travers un de ses membres, à qui il est vite apparu que le Club, avec son réseau de compétences, était mieux à même de satisfaire au cahier des charges.

Nous attendons le résultat de la consultation. Il semblerait que nous soyons dans la “short list”…

EDITO

Le Club fête ses quatre ans !

Respectable pour une initiative sans prétention, lancée par quelques amis.

Aux premières dîners entre copains ont vite succédé des soirées plus formelles, organisées autour de thèmes et de personnalités en prise avec les interrogations de la société numérique.

Si la plupart des membres garde toujours une tendresse particulière pour les réalités virtuelles, ses casques et ses fantasmes, au fil des ans, le besoin d'une réflexion collective sur les effets des technologies de l'information s'est imposé.

En quatre années, de nombreux domaines ont été abordés : santé, économie, médecine, art, …

Des séances passionnantes ont réuni, soit quelques convives, soit, dans les grandes occasions, comme la soirée de Pierre Lévy ou celle de Fred Forest, plus d'une trentaine.

Plusieurs voix se désolent d'ailleurs que le Club n'ait pas mieux su capitaliser ces acquis.

Un Comité de Rédaction a été constitué en vue d'une initiative éditoriale dans ce sens : la publication d'un ouvrage collectif sur l'hypermonde. Envisagé pour la fin de l'année, il réclame encore beaucoup d'efforts.

La diversité des ambiances, tantôt légères, tantôt sérieuses, fait le charme des soirées chez Clovis (notre lieu de rencontre attitré).

Avides de modèles explicatifs pour les phénomènes émergents, certains intervenants ont failli dépasser la capacité d'écoute bienveillante des convives. Sans concurrencer l'Académie de Platon, le Club ne répugne donc pas d'aborder, pour la bonne cause, quelques questions philosophiques.

Avec l'active contribution de tous ses membres, l'année 95 verra sans doute le renforcement de la notoriété et de la légitimité de notre Club dans le débat en cours sur la Société numérique.

JPB

PRENEZ VOS BILLETS !

La “Virtual Reality World '95”, organisée par le Fraunhofer Institut, se tiendra du 21 au 23 février à Stuttgart.

Rendez-vous européen des spécialistes de la VR, la France brille par la faiblesse de sa représentation. Heureusement, par sa présence, notre Président sauvera l'honneur national, épaulé par Philippe Quéau.

Si vous souhaitez assister à l'ensemble des sessions, comprenant tutorials et toute une palette d'applications - de la médecine à l'art, en passant par l'architecture-, il vous en coûtera 1.700 DM, plus TVA, voyage et séjour non-compris.

Pour l'édition 96, nous nous efforcerons de mettre en œuvre une participation virtuelle, accessible si possible à partir de Chez Clovis, avec un tarif préférentiel.

Renseignements :

Tel 19 49 89 3 60 86 390

Fax 19 49 89 3 60 86 274

QUELQUES MOTS SUR LE FRAUNHOFER INSTITUT

D'après une brochure de présentation, l'Institut poursuit une activité de recherche appliquée dans le domaine de la VR. Il dispose à la fois d'un parc important de matériels spécifiques et d'un savoir-faire éprouvé lui permettant de traiter des contrats pour l'industrie.

Les illustrations montrent plusieurs applications classiques : simulation d'une opération chirurgicale, interface utilisateur basée sur des Icônes dans un univers 3D, mais aussi une simulation d'éclairage de pièce, déjà moins courante.

Contact :

Ing. W. Bauer

email : Wilhelm.Bauer@iao.fhg.de

S. F.

Le 9° Festival de la Science-Fiction et de l'imaginaire se déroulera du 8 au 14 mars à Roanne.

Apparemment, les organisateurs sont à la recherche d'auteurs. C'est l'occasion d'exposer vos fantasmes les plus délirants, vos œuvres les plus déroutantes.

Si vous êtes retenus, vous serez en compagnie de Mœbius (cf. l'article paru dans le N°17 des chroniques), Caza, Vatine et de quelques autres.

Contact :

RASF, 12 av de Paris - 42300 Roanne

Tél 77 72 09 25

QUE FAIT-ON LE MARDI SOIR

CHEZ CLOVIS ? ON PLANCHE !

Pour répondre à la question, voici quelques extraits du sujet que Jean-Paul Bois a traité devant les membres présents, le 15 novembre dernier, sur le thème :

Quel espace, quel temps pour l'hypermonde ? “.

" Les notions d'espace et de temps sont étroitement associées à la découverte du monde. Les portulans des premiers navigateurs, description empirique de l'espace, ne prirent leur pleine efficacité qu'avec la mesure précise du temps et la détermination de la longitude.

" Forces et inerties, grandeurs mécaniques, ont structuré l'espace jusqu'à l'avènement de l'électromagnétisme. Nous y mouvoir impliquait consommation de temps et d'énergie, source inépuisable de fatigue, de dangers parfois.

" Le temps, divinité saturnienne, mesurait l'espace. Désormais, dernier avatar de cette inquiétante figure, il le boit. Temps-réél, commutation instantanée, autant de manifestations d'un espace-temps électro-magnétique omniprésent et omnipotent.

"(…) Temps et espace sont des catégories si profondément inscrites dans notre physiologie et dans notre culture qu'il est difficile de les aborder d'une manière totalement naïve.

A la question : qu'est-ce que l'espace, qu'est-ce que le temps, une multitude de réponses jaillissent spontanément. (…) Il faut donc consentir un certain effort pour gommer ces acquis et retrouver l'innocence de nos lointains ancêtres.

" (…) L'espace-temps est une construction abstraite qui s'installe à partir d'un renversement. Prenons un exemple. Pour un parisien, dans les années soixante, Lyon était à environ 500 kilomètres de Paris.

Depuis la liaison autoroutière de bout en bout, les automobilistes ne mesurent plus la distance en kilomètres mais en fonction du nombre d'heures de conduite. Quatre heures environ.

Avec le T.G.V., la distance est définitivement occultée : “Lyon est à deux heures de Paris“.

Un nouvel espace-temps du territoire (ou de la planète ) se dessine subrepticement, bien plus lié au temps de transport, qu'à la distance réelle à parcourir.

Des espaces-temps paradoxaux

" (.) On découvre ainsi des espace-temps paradoxaux : partant de Paris en Concorde, New-York est plus “proche” que Nice, en train.

Les exemples abondent. En fonction du choix d'un réseau rayonnant, les transports en commun de et vers la périphérie parisienne sont fréquents et rapides. Un déplacement, par les mêmes transports, de banlieue à banlieue, prend des allures d'expédition hasardeuse.

Cette remarque introduit la notion d'un morcellement, d'une juxtaposition d'espaces-temps de gradients différents.

C'est une brèche dans la représentation du territoire comme un continuum d'espace.

Ainsi, l'espace autoroutier européen correspond à l'espace-temps de la modernité, c'est à dire de la vitesse, du déplacement sans entraves.

Sortez par la première bretelle d'accès et vous vous retrouvez presque à coup sûr dans l'espace-temps de la carte Michelin au 200.000°, confronté aux délices de la flânerie, volontaire ou forcée.

Cette réévaluation du territoire en fonction d'un espace-temps lié aux transports, peut s'étendre à de nombreux autres secteurs : économique, politique, … .

" (…) l'Hypermonde traduit le passage de la physique de Newton à celle de Maxwell. Du mouvement de la roue à l'agilité de l'électron. D'un espace-temps à échelle corporelle, lié aux lentes migrations de l'espèce, à l'espace-temps électromagnétique, instantané, plus proche de la vivacité de la pensée que des pesantes limites de notre pauvre corps.

L'espace, source de toute appropriation du monde réel n'est plus perçu comme le résultat de multiples expériences proprioceptives. Il se recompose selon d'autres figures. Il dévoile d'autres univers.

Une métaphore éclairante

" l'Hypermonde émerge de la multiplication des émetteurs-récepteurs. L'espace de l'hypermonde est formé de ce tissu enchevêtré de mailles électromagnétiques.

Quelle représentation formuler pour représenter un espace que nos yeux ne peuvent voir, notre esprit comprendre ? Olivier Auber propose une métaphore intéressante. La représentation de l'espace, avant la renaissance, ignorait ce qui nous paraît désormais évident : la perspective. Ce simple artifice ordonne désormais notre compréhension de l'espace. Nous “voyons” sur une représentation plane, les volumes, la profondeur d'une scène réelle.

Quels points de fuite assigner au paysage électromagnétique, à l'hypermonde afin de le rendre intelligible ?

*

Le texte complet de l'exposé fera l'objet d'une publication ultérieure.

S&EACUTEMINAIRE ESTH&EACUTETIQUE DE LA COMMUNICATION &AGRAVE NICE

Organisé par Fred Forest, membre du Club, artiste, Professeur titulaire de la Chaire du même nom à l'Université de Nice, le séminaire accueillera vendredi 27 janvier, trois représentants du Club : Pierre Berger, Jean-Paul Bois et Eddie Soulier.

Un compte rendu de cette manifestation sera donné dans le prochain numéro des chroniques.

THERMODYNAMIQUE DE L'HYPERMONDE

A l'occasion de ce séminaire, Pierre Berger a préparé un texte dont voici, en avant première, quelques extraits.

" Les deux chimies

L'homme a peu à peu organisé l'univers autour de lui. D'une certaine manière, il en a fait croître la complexité, mais toujours comme une complexité "asservie", c'est à dire au moins en principe, dépendante de lui.

Pour cette raison, il n'a pu tolérer les formes de complexité qu'il ne pouvait contrôler, et a donc peu à peu fait disparaître les formes concurrentes, notamment les "bêtes sauvages" et les "mauvaises herbes".

D'une certaine manière, la chimie du silicium tend aujourd'hui à prendre le relais de la chimie du carbone. Et l'une des questions clés qui s'ouvrent pour le prochain siècle, sinon pour le prochain millénaire, c'est de voir comment ces deux chimies réagiront entre elles.

" Première hypothèse. Stabilité: la chimie du carbone continue à n'évoluer que très peu. L'homme reste lui-même. Et la chimie du silicium reste sous son contrôle, sans remise en cause fondamentale. L'ordinateur n'est qu'un outil.

" Deuxième hypothèse. Fin de l'humanité: la chimie du carbone n'évolue plus, voire régresse. Le silicium continue de monter et un beau jour prend le dessus, avec la complicité volontaire de l'homme, en luttant contre lui ou en prenant le pouvoir "gentiment" (thèse d'Asimov dans Les Robots ou de Moravec). Le tout est de savoir à quelle date se fait la mutation (2050 pour Moravec, ce qui paraît tout de même surestimer largement la vitesse de progrès du silicium).

" Troisième hypothèse. Synthèse/symbiose. L'homme accepte de mieux en mieux la montée du silicium et commence à accepter les liaisons directes de son système nerveux avec les outils informatiques.

Bien que choqué au départ par cette évolution (L'homme terminal, Total Recall), il l'accepte néanmoins au service des handicapés, puis pour le plaisir, puis finalement de gaieté de coeur, comme seul moyen de marcher vraiment vers un au-delà d'une humanité certes admirable, mais qui a aussi montré ses limites, à Hiroshima ou à Auschwitz par exemple. (…)

Vers une formulation générale de la valeur

&QUOT Appelant une nouvelle géologie et une nouvelle thermodynamique, à partir de modélisations formalisées, l'hypermonde peut aussi nous conduire à une théorie générale de la valeur et même des valeurs.

La formule de l'entropie permet une puissante synthèse, d'autant plus impressionnante que la théorie de l'information rejoint la thermo-dynamique classique dans le concept d'entropie. Même si de bons auteurs mettent en garde contre une trop facile analogie formelle.

Prenant l'entropie, ou la néguentropie, comme valeur générale pour tout objet et tout système, matériel ou informationnel, nous pouvons tenter d'aller jusqu'à fonder une nouvelle éthique. En posant par exemple que tout système tend à maximiser l'intégrale de son espérance mathématique de néguentropie, nous obtenons ainsi un modèle explicatif et normatif de l'ensemble des comportements.

Malgré la puissance possible d'un tel modèle, on se gardera de le prendre au sérieux. Comme nous l'avons vu plus haut, il a toutes les chances de perdre d'autant plus de rigueur et de solidité qu'il se voudra étendu. L'hypermonde est un vaste espace qui ne connaîtra jamais completement ses lois. Mais sa construction stimule notre passion, ravive nos craintes séculaires de l'avenir, nous laisse plus que jamais face à nos responsabilités. "

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DOSSIERS M&EACUTEMOIRE D'ENTREPRISE

Philippe Blasco, journaliste scientifique, membre Club, a publié un dossier très documenté sur les Nouvelles technologies de la mémoire.

A partir d'une travail d'enquête sur le terrain et d'une intéressante mise en perspective, il propose une collection complète d'études sur un sujet qui devient de plus en plus déterminant pour la compétitivité des entreprises.

Renseignements :

Lynx-Edicom

21, rue Tournefort - 75005 Paris

Tél : 47 07 29 29 - FAX 47 07 31 29

UNE APPLICATION DE LA R.V.

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La restitution de la célèbre grotte sous-marine Cosquer, découverte en 1991 dans la calanque de Sormiu à quelques kilomètres de Marseille, devrait donner lieu, quand la technique sera à la hauteur, à une superbe réalisation de Réalité Virtuelle.

Le Monde du 14 janvier 1994 a publié un long article intitulé “ la grotte Cosquer entre dans la troisième dimension “, décrivant la compétition entre deux approches de représentation. La première, utilise la technique classique, en archéologie, de la stéréophoto-grammétrie. Elle permet une restitution de la réalité à partir d'un millier de clichés photo-graphiques sur lesquels seront prélevés 40.000 points de mesure.

La seconde, plus proche des images numériques, fait appel à un dispositif mis au point à la demande d'EDF. Il permet de reconstituer par visées laser le treillis de points (4,5 millions) représentant le relief et la texture la grotte.

Bien entendu, la seconde méthode, par le nombre des mesures mises en œuvre reste hors de portée de la résolution et des capacités de traitement des équipements actuels de RV.

Mais, les outils progressant vite et la grotte restant à jamais peu pratique d'accès, il était sage de constituer dès maintenant des archives numériques conséquentes de ce témoin des dures réalités de la dernière glaciation.

RENDEZ-VOUS DU MARDI SOIR

Vous êtes toujours les bienvenus tous les mardi-soir à partir de 19 heures 30, au Restaurant :

Chez Clovis

33, rue Berger 75001 Paris

Tél : 42 33 97 07

(Métro Halles, face à St Eustache )

P.S. POUR CONTINUER &AGRAVE RECEVOIR LES CHRONIQUES, N'OUBLIEZ PAS DE NOUS FAIRE PARVENIR VOTRE COTISATION.

( 300 F pour l'année, par chèque postal ou bancaire à l'ordre du Club de l'Hypermonde.

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